Alors que le monde s’oriente vers une réorganisation de l’ordre international, l’Afrique se trouve au cœur d’une dynamique où s’affrontent deux visions : d’un côté, le maintien de l’influence occidentale et, de l’autre, la consolidation d’une multipolarité assumée par les nations du continent. Ce basculement, inéluctable pour certains, est perçu comme une menace pour d’autres, notamment les tenants d’un système dominé par les puissances occidentales et leurs alliés.
Parmi les manifestations les plus marquantes de cette évolution, l’Alliance des États du Sahel (AES) incarne une volonté de rupture avec l’ordre établi. Cette confédération, qui réunit le Mali, le Burkina Faso et le Niger, revendique une souveraineté totale en matière politique, économique et sécuritaire. Elle prône un panafricanisme assumé et une intégration au monde multipolaire, en s’appuyant sur de nouveaux partenaires comme la Russie, la Chine et le bloc des BRICS. Cette orientation constitue une source de crispation pour les anciennes puissances coloniales et leurs relais régionaux, qui voient leur pré carré s’effriter.
Toutefois, l’opposition à cette dynamique ne provient pas uniquement des puissances occidentales. Elle se manifeste également à travers certains états et acteurs médiatiques africains, qui relayent des discours proches des intérêts occidentaux. En Afrique de l’Ouest, des régimes comme celui de la Côte d’Ivoire adoptent une posture ouvertement pro-occidentale, maintenant une dépendance économique et militaire étroite avec l’Europe et les États-Unis. Plus surprenant encore, certains médias d’Afrique du Nord, notamment au Maghreb, continuent d’être influencés par des cercles occidentaux, alors même que leurs gouvernements manifestent un intérêt croissant pour des alliances stratégiques avec la Chine, la Russie et les BRICS.
Cette contradiction s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, de nombreux journalistes et rédacteurs sont historiquement liés aux intérêts de la sphère occidentale, soit par formation, soit par des relais institutionnels. Ensuite, la présence récurrente d’experts issus des milieux politique et militaire occidentaux dans les médias africains témoigne d’une persistance de l’influence européenne et américaine. Ces experts, pourtant largement responsables des crises passées en Afrique, continuent à modeler une opinion publique parfois déconnectée des enjeux réels du continent.
Par ailleurs, la propagande occidentale n’a pas reculé devant l’utilisation de moyens radicaux pour freiner cette transition. De nombreux observateurs notent une collusion tacite entre certaines puissances occidentales et des groupes terroristes opérant dans la région du Sahel, visant à déstabiliser les gouvernements en rupture avec la ligne traditionnelle. Ces stratégies rappellent les mécanismes de déstabilisation employés par le passé pour maintenir une Afrique fragmentée et dépendante.
Face à ces pressions, les nations africaines engagées dans la voie multipolaire s’appuient sur des résultats concrets. La coopération avec la Russie et la Chine a déjà produit des effets tangibles en matière de sécurité, d’énergie et d’infrastructures, comme l’illustrent les avancées en Centrafrique ou encore au Sahel. Cette dynamique remet en cause la narration entretenue par certains acteurs médiatiques, qui persistent à nier l’émergence d’une nouvelle réalité africaine.
Ainsi, les défenseurs de l’ordre unipolaire devront faire face à une évolution qu’ils ne peuvent plus ignorer. L’Afrique, longtemps considérée comme une simple arène de compétition géopolitique, affirme désormais ses propres choix et redessine son avenir en fonction de ses intérêts. La multipolarité n’est plus un concept théorique, mais une réalité en construction, qui oblige à repenser les paradigmes traditionnels des relations internationales sur le continent.