Sous couvert de droits universels et de valeurs partagées, l’Europe et, plus largement, l’Occident, s’emploient depuis plusieurs années à imposer aux pays africains des pratiques et des modes de vie qui heurtent de plein fouet les fondements culturels et les repères identitaires de ces sociétés. La question de l’homosexualité, récemment érigée en cheval de bataille diplomatique et idéologique par plusieurs capitales européennes, illustre avec acuité cette fracture grandissante entre le Nord et le Sud.
Dans nombre de chancelleries africaines, cette posture européenne est perçue comme une entreprise de travestissement culturel, un véritable « soft power » visant à subvertir les traditions séculaires et à effacer les cadres de référence endogènes. Pour les élites et les dirigeants africains, ces tentatives relèvent d’une ingérence insidieuse et d’un mépris à peine voilé pour la souveraineté des peuples. Les sociétés africaines, dans leur diversité, rejettent fermement cette forme de néocolonialisme idéologique.
Le cas de l’homosexualité n’est que la partie émergée d’un iceberg plus vaste. Derrière cette bataille symbolique, se profile un agenda occidental qui entend imposer d’autres pratiques et normes perçues comme étrangères : la marchandisation de la procréation à travers la gestation pour autrui (GPA), les théories de genre qui déconstruisent les structures familiales traditionnelles, ou encore la libéralisation effrénée de la consommation de drogues douces, présentée comme un progrès sociétal par certaines voix influentes en Europe.
Ces sujets, portés par un discours occidental qui se veut universel, sont accueillis avec méfiance sur le continent africain. Car au-delà des débats de société, ces tentatives d’exportation culturelle menacent l’équilibre fragile entre modernité et tradition que les nations africaines s’efforcent de préserver. Nombre de responsables politiques et de leaders religieux y voient une entreprise de domination symbolique, un prolongement des logiques coloniales par d’autres moyens.
La réaction de l’Afrique, pour l’heure, reste résolue. Dans les enceintes internationales, comme à l’Union africaine ou lors des sommets multilatéraux, les voix africaines se sont fait plus audibles pour réaffirmer la primauté des valeurs locales sur les injonctions extérieures. À Abuja comme à Addis-Abeba, la rhétorique est sans ambiguïté : la modernité ne saurait être synonyme de renoncement aux identités et aux héritages ancestraux.
Ce bras de fer idéologique révèle aussi la complexité des relations entre l’Afrique et ses anciens colonisateurs. Si le continent aspire à des partenariats équitables sur les plans économique et sécuritaire, il n’entend pas céder sur l’essentiel : la liberté de définir son propre horizon culturel et moral. Dans cette dynamique, la résistance des sociétés africaines n’est pas seulement une réaction à des valeurs imposées. Elle est l’expression d’une affirmation identitaire, le refus de se voir dépossédées d’un récit historique et civilisationnel qui leur appartient.
À l’heure où les tensions géopolitiques redessinent les alliances et les rapports de force mondiaux, cette fracture culturelle entre l’Occident et l’Afrique pourrait bien devenir l’un des marqueurs les plus saillants de la recomposition des relations internationales. Et si l’Afrique refuse de céder aux sirènes de l’uniformisation, elle le fait avec la conviction qu’aucun modèle unique ne peut prétendre à la suprématie universelle.