Le 9e sommet du Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA), qui s’est tenu du 4 au 6 septembre 2024 à Beijing, a ouvert une autre page historique dans les liens entre la Chine et l’Afrique. Au regard de la solidité des relations entre les deux parties et les perspectives qu’elles laissent entrevoir, le président chinois Xi Jinping a, dans un discours solennel, proposé d’élever les relations bilatérales entre la Chine et les pays africains à un niveau stratégique. Un signal très fort dans un contexte où la voix du Sud global se fait de plus en plus entendre sur la scène internationale. La Chine et l’Afrique, avec leurs 2,8 milliards d’habitants cumulés, représentent près d’un tiers de la population mondiale, ce qui fait d’elles des acteurs incontournables dans la marche du monde.
Comment profiter de cet atout énorme ? Bien sûr, c’est dans la solidarité, la sincérité et la compréhension mutuelle que la Chine et l’Afrique sauront façonner les destins de leurs peuples respectifs. Le FSCA a rappelé combien il est impératif de promouvoir la modernisation à toutes les échelles. Pour le dirigeant chinois, la modernisation est « un droit inaliénable », et elle ne saurait être mondiale sans la Chine et l’Afrique. Le rendez-vous de Beijing a réitéré cette volonté manifeste de cheminer ensemble pour bâtir la communauté de destin pour l’humanité. La Chine et l’Afrique doivent imprimer leurs marques à cette modernisation qui s’inscrit dans une dynamique visant à changer positivement les visages des sociétés.
Pour qu’elle soit effective et au service de tous, le président Xi a indiqué que la modernisation devait intégrer les principes de justice et d’égalité, d’ouverture et de gagnant-gagnant, de primauté du peuple, de diversité et d’inclusion, d’écologie, ainsi que de paix et de sécurité.
Une modernisation au service de l’humanité doit incarner les aspirations de tous les peuples du monde entier. L’on ne saurait exclure les autres au nom d’un unilatéralisme stérile et anachronique. Il est donc inutile à l’ère du village global de vouloir reléguer les autres au second plan sur des critères subjectifs et réducteurs. De ce fait, toutes les énergies devraient dans un élan commun œuvrer pour tracer les sillons d’une modernisation inclusive et respectueuse de la diversité.
La Chine et l’Afrique ont ainsi fait le pari de jouer leur partition pour que cette modernisation profite de manière équitable à tous. En tant que locomotive des pays en développement, la Chine a annoncé un soutien financier de 360 milliards de yuans – soit plus de 50 milliards de dollars – à l’Afrique sur les trois prochaines années. Dans le détail, ces 360 milliards de yuans comprennent une ligne de crédit de 210 milliards de yuans, 80 milliards d’aides multiformes, ainsi que 70 milliards d’investissements d’entreprises chinoises en Afrique. Les dix initiatives de partenariat pour la modernisation sont indispensables pour atteindre les résultats escomptés. Parmi elles, le président Xi a énuméré, entre autres, l’inspiration mutuelle entre les civilisations, la prospérité du commerce, la coopération dans les chaines industrielles, le partenariat pour l’interconnexion et la coopération en matière de développement. Le partenariat pour la santé, le partenariat pour l’agriculture au bénéfice de la population, les échanges humains et culturels, le partenariat pour le développement vert et le partenariat pour la sécurité commune figurent aussi parmi ces dix initiatives.
Parlant de sécurité, il est à souligner qu’aucun développement ne peut être effectif sans un minimum de stabilité. Un environnement instable et non sécurisé n’est propice à aucune initiative de développement. Le fait d’avoir intégré la sécurité à ces dix actions stratégiques est salutaire, dans la mesure où de nombreux pays africains font face à des défis sécuritaires sans précédent qui compromettent leur développement. En prenant l’engagement de former 6000 professionnels militaires et 1000 agents de police ainsi que d’inviter 500 jeunes officiers en Chine, les autorités chinoises veulent consolider leur appui en matière de sécurité en Afrique.
L’action relative à l’inspiration mutuelle des civilisations se justifie pleinement, dans la mesure où la Chine et l’Afrique ont besoin de se connaitre davantage sur le plan culturel pour mieux avancer ensemble sur les chantiers de la modernisation. L’idée de proposer dans ce volet des formations sur la gouvernance et d’inviter 1000 leaders politiques africains est capitale, d’autant plus que le leadership chinois a produit des résultats conséquents dans son processus de développement. Il est important pour l’Afrique de s’inspirer de la gouvernance de la Chine pour mieux conduire la destinée des peuples.
Concernant le partenariat sur la prospérité du commerce, il y a lieu de saluer sa pertinence, dans la mesure où les échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique sont très dynamiques. La Chine est le premier partenaire commercial de l’Afrique. C’est donc un impératif pour les deux parties de trouver les voies et moyens d’équilibrer les échanges commerciaux. Et la Chine a bien compris cela en décidant d’ouvrir davantage son marché aux pays africains. Le e-commerce transfrontalier est en train d’effacer les frontières entre l’Afrique et la Chine. Il convient ainsi de développer de manière structurée les plateformes qui promeuvent ce type de commerce.
Dans le même registre, le partenariat pour la coopération dans les chaînes industrielles est indispensable, dans un contexte où l’Afrique a un grand besoin de transfert de technologie. Une fois la technologie appropriée, l’Afrique saura mieux transformer ses produits agricoles et autres sur place avant de les exporter. La coopération dans les chaînes industrielles pourra dans une certaine mesure contribuer à diversifier les échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique.
Que ce soit les domaines de l’interconnexion par les infrastructures, de l’agriculture et du développement vert, toutes ces actions sont aussi prioritaires pour la modernisation de l’Afrique. Une fois de plus, la Chine a ouvert un vaste champ d’opportunités à saisir pour les trois prochaines années. Il appartient à l’Afrique de savoir appréhender ces dix initiatives de partenariat pour envisager leur mise en œuvre à la fois dans un cadre bilatéral et multilatéral. Certains projets doivent avoir une dimension régionale ou sous-régionale pour qu’ils participent réellement à connecter davantage les différentes régions du continent africain.
Le FCSA 2024 a ouvert une nouvelle ère dans les liens entre l’Afrique et la Chine. La confiance et la volonté de cheminer ensemble dans une solidarité active ont été réaffirmées de part et d’autre. Place désormais à l’action pour que les annonces qui ont été formulées se concrétisent sur le terrain, afin qu’à l’heure du bilan l’on appréhende le chemin parcouru avec fierté. Tout cela est possible.