La dynamique économique mondiale, confrontée à des défis inédits, évolue vers un ordre nouveau. C’est le constat dressé par le Dr Andrei Rădulescu, expert à l’Institut d’Économie Mondiale de Roumanie, lors d’une conférence donnée à Casablanca le 17 mars 2025.
Trois ans après l’éclatement du conflit en Ukraine, le monde traverse une période de bouleversements géopolitiques et économiques majeurs, marquée par une fragmentation sans précédent. Cette fragmentation, selon le Dr Rădulescu, se manifeste notamment par un commerce international sous tension, dont la croissance demeure largement inférieure à sa tendance historique, reflet direct d’une crise de confiance persistante sur les marchés.
Les États-Unis continuent de dominer financièrement, malgré une capitalisation boursière historiquement élevée, atteignant des niveaux rarement vus en rapport avec le PIB national. Paradoxalement, ce leadership économique s’accompagne d’un niveau record d’incertitude mondiale, dépassant largement celui observé lors des précédentes crises.
L’expert souligne que les économies émergentes, rassemblées sous l’appellation de « Sud global », jouent un rôle croissant face à l’affrontement stratégique entre la Chine et les États-Unis, une rivalité qui façonnera durablement les équilibres mondiaux.
L’Europe, quant à elle, lutte avec ses propres contradictions, entre compétitivité affaiblie et impératif de convergence économique. La décennie actuelle est ainsi définie par quatre défis majeurs surnommés les « quatre D » : divergence économique, endettement accru, urgence de la décarbonation et nécessité d’un développement durable.
Par ailleurs, les indicateurs récents révèlent un climat macroéconomique mondial contrasté : bien que les signaux indiquent une certaine stabilisation post-ajustement, le début de l’année 2025 reste marqué par une activité économique faible, notamment illustrée par un indice PMI composite mondial en retrait.
Sur le plan fiscal, les économies développées et émergentes sont confrontées au « trilemme » difficilement résoluble : concilier croissance, stabilité budgétaire et maîtrise de la dette publique. À l’heure actuelle, la dette publique atteint des niveaux alarmants, particulièrement dans les pays développés, exerçant une pression continue sur leurs économies.
Pourtant, malgré cette situation complexe, le niveau général de stress financier reste modéré, donnant l’impression trompeuse d’une relative stabilité. Toutefois, le coût réel du financement augmente significativement, particulièrement aux États-Unis, où le resserrement quantitatif mené par la Réserve fédérale pourrait annoncer de nouveaux chocs à venir, comme le laisse présager la hausse continue du prix de l’or.
Face à ces multiples défis, le Dr Rădulescu plaide pour un nouvel accord international, un « Bretton Woods » renouvelé, afin d’éviter une dégradation accélérée de la situation. Ce nouvel élan diplomatique et économique permettrait de combler l’écart croissant entre discours politiques et réalités économiques, tout en exploitant mieux le potentiel inexploité des régions moins développées.
Enfin, l’expert roumain rappelle l’importance d’une diplomatie économique active comme moteur de paix et de prospérité, et conclut en insistant sur la nécessité impérieuse d’agir rapidement, intelligemment, et sur tous les fronts pour surmonter les crises à venir.