mardi, octobre 14

L’Algérie traverse une crise inattendue au sommet de son appareil militaire. L’évasion spectaculaire du général Abdelkader Haddad, plus connu sous le surnom de Nasser El-Djinn, ancien chef de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), met à nu la fragilité d’un système longtemps présenté comme impénétrable. Limogé le 22 mai dernier puis placé en résidence surveillée, l’officier aurait pris la fuite vers l’Espagne à bord d’une embarcation, bénéficiant, selon plusieurs sources sécuritaires, de complicités au sein même de l’armée.

Figure redoutée dans les cercles du renseignement, Nasser El-Djinn est considéré comme l’un des officiers les mieux informés sur les rouages internes du régime. Ses dossiers couvriraient aussi bien les luttes de clans au sein de l’armée que les réseaux de corruption et les méthodes de répression politique. Sa disparition n’est pas seulement un revers symbolique : elle menace d’exposer au grand jour des secrets qui fragiliseraient directement le chef d’état-major, le général Saïd Chengriha, ainsi que le président Abdelmadjid Tebboune.

La fuite, qui s’apparente à une véritable opération clandestine, aurait mobilisé des officiers de haut rang, soulignant la porosité des mécanismes de contrôle interne. L’épisode met ainsi en lumière l’existence de fractures au sommet d’un système réputé verrouillé depuis la guerre civile des années 1990.

La riposte des autorités a été immédiate. Alger a été quadrillée par les forces de sécurité, le Haut Conseil de sécurité convoqué en urgence et plusieurs postes frontaliers temporairement fermés. Ces mesures traduisent la nervosité d’un pouvoir pris de court par une défaillance de son propre appareil sécuritaire. Elles reflètent aussi une inquiétude plus profonde : celle de voir les réseaux de loyauté interne se déliter dans un contexte politique déjà tendu.

L’évasion révèle des failles criantes dans la chaîne de commandement. L’armée, pilier du système algérien, apparaît divisée et vulnérable, alors même qu’elle constitue le socle de l’autorité de l’État.

Installé en Espagne, Nasser El-Djinn pourrait devenir un atout stratégique pour des puissances étrangères désireuses d’exercer une pression sur Alger. Ses révélations potentielles offriraient également un outil de mobilisation inédit aux opposants politiques en exil.

L’Algérie, acteur majeur du Maghreb et puissance influente au Sahel, se retrouve affaiblie sur la scène régionale. Cette vulnérabilité pourrait être exploitée par des groupes armés transfrontaliers ou accentuer l’instabilité d’un environnement déjà fragile, de la Libye au Mali.

L’évasion de Nasser El-Djinn dépasse le simple fait divers sécuritaire : elle symbolise l’érosion de l’autorité d’un régime militaire qui se voulait monolithique. Elle révèle l’ampleur des fractures internes et ouvre une phase d’incertitude dont les répercussions dépassent les frontières algériennes.

Pour Alger, l’affaire constitue un avertissement brutal : l’équilibre précaire qui maintenait le système en place pourrait désormais vaciller sous le poids de ses propres contradictions.

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