Le 24 février 2022, la FIFA, l’UEFA et le CIO ont publié des déclarations distinctes condamnant la Russie quelques heures seulement après le lancement de son opération militaire en Ukraine.
Quatre jours plus tard, le Conseil de la FIFA et le Comité exécutif de l’UEFA ont interdit à toutes les équipes russes de participer aux tournois internationaux de football.
La commission exécutive du CIO, quant à elle, a formulé des recommandations similaires le même jour.
Deux ans plus tard, le 10 juillet 2024, la revue médicale américaine The Lancet a publié un rapport estimant que « jusqu’à 186 000 décès, voire plus, pourraient être imputables au conflit actuel à Gaza », affectant une population dont 47 % ont moins de 18 ans.
Le bilan officiel de la guerre génocidaire menée par Israël contre les Palestiniens dans la bande de Gaza s’élève à près de 42 400 morts, dont plus de 17 000 enfants. Cependant, des milliers d’autres restent ensevelis sous les décombres et portés disparus.
Six mois avant la publication du rapport de The Lancet, le 26 janvier, la Cour internationale de justice a rendu une décision provisoire dans une affaire initialement déposée par l’Afrique du Sud, par laquelle elle avait considéré comme étant « plausibles » les accusations de génocide contre Israël à Gaza.
Cela sans même mentionner les images horribles d’hommes, de femmes et d’enfants palestiniens mutilés et massacrés qui circulent quotidiennement sur les réseaux sociaux depuis le 7 octobre 2023.
Quelle a été la réponse de la FIFA ? Sous la direction de Gianni Infantino – qui, lors de la Coupe du monde 2022 au Qatar, a exprimé un large éventail d’identités mondiales – l’instance dirigeante du football mondial s’est livrée à l’un des actes de manipulation politique et de blanchiment du sport les plus importants et les plus obscènes de l’histoire de l’humanité.
Le 3 octobre dernier, la FIFA a annoncé que sa Commission de discipline allait « ouvrir une enquête sur le délit de discrimination présumé soulevé par la Fédération palestinienne de football ».
Et d’ajouter que la Commission de Gouvernance, Audit et Conformité de la FIFA « se verra confier la mission d’enquêter sur la participation à des compétitions israéliennes d’équipes de football israéliennes qui seraient basées sur le territoire palestinien », et de guider ensuite le Conseil de la FIFA à ce sujet.
Ce langage ridicule intervient après que la décision de prendre des mesures contre Israël a été reportée au moins trois fois.
Infantino a déclaré : « La violence en cours dans la région confirme, qu’avant toute chose et comme cela a été déclaré lors du 74e Congrès de la FIFA, nous avons besoin de paix ».
« Alors que nous restons extrêmement choqués par ce qui se passe, nos pensées vont à ceux qui souffrent. Nous exhortons toutes les parties à rétablir immédiatement la paix dans la région. »
Il est évident qu’Infantino, qui a indiqué un jour se sentir « africain, qatarien, handicapé, femme »… n’étend pas ce sentiment aux Palestiniens.
Dans ce droit fil, prenons le cas de Muhammed Bhar, un Palestinien de 24 ans atteint de trisomie 21 et d’autisme, qui a été tué lorsque des soldats israéliens ont lâché un chien militaire sur lui. Lorsque le chien l’a attaqué, Muhammed a essayé de calmer l’animal.
Personnellement, je doute qu’Infantino soit capable de ressentir grande chose, sauf peut-être la sensation de se courber sur commande, comme un chien de compagnie obéissant des sionistes – mais bien sûr, après s’être rempli les poches.
Selon une citation de Mark Tween « il y a trois sortes de mensonges : les mensonges, les sacrés mensonges et les statistiques ».
Au cours de l’année écoulée, sur fond de l’agression incessante d’Israël à Gaza et maintenant au Liban, soutenue par l’Occident, nous avons été témoins de trois niveaux d’hypocrisie : l’hypocrisie, l’hypocrisie maudite et l’hypocrisie de la FIFA.
Ce faisant, la FIFA a ouvert la voie aux clubs de football européens pour blanchir le génocide perpétré par Israël à Gaza et au Liban, et ce, alors que des personnes innocentes continuent de mourir à chaque instant.
Un exemple particulièrement flagrant est celui du club de football allemand Borussia Dortmund.
Le club de Bundesliga a dû faire face à une vive réaction de ses propres fans lorsqu’il a annoncé que la compagne d’arme allemande Rheinmetall serait son principal sponsor maillot.
Sur leur site Internet, ils ont exprimé leur « responsabilité historique envers Israël », ajoutant qu’ils étaient « pleinement engagés » en faveur du « droit à exister » du régime d’apartheid israélien.
Le 7 octobre 2024, à l’occasion du premier anniversaire de l’opération Tempête d’Al-Aqsa, le Borussia Dortmund et plusieurs autres clubs de Bundesliga ont publié des déclarations similaires, dans lesquelles ils ont condamné les groupes de résistance palestiniens, mais sont restés silencieux sur les près de 43 000 Palestiniens (bilan officiel) tués au cours de l’année écoulée, dont la plupart étaient des femmes et des enfants. Parmi les morts figurent de jeunes footballeurs, dont des supporters de Dortmund.
La veille, Aboubaker Abed, journaliste de football et correspondant de Press TV basé à Gaza, et Leyla Hamed, journaliste hispano-marocaine, ont publié une vidéo de Deir al-Balah, une ville du nord de la bande de Gaza.
La vidéo a été enregistrée le lendemain du bombardement par des avions de guerre israéliens d’une mosquée remplie de personnes cherchant refuge contre la campagne de bombardements aveugles.
Sous les décombres, un maillot déchiré du Borussia Dortmund a été découvert, arborant le nom et le numéro de Marco Reus. Ni le Borussia Dortmund ni Marco Reus n’ont publié de déclaration s’adressant à leurs fans palestiniens dévoués, morts ou vivants.
Je suppose que le geste des joueurs de l’équipe nationale allemande se couvrant la bouche pendant la Coupe du monde de la FIFA en 2022 était moins une protestation qu’une confession de leur complicité dans ce qui s’est passé, ce qui se passe maintenant et ce qui est encore à venir.
Ceci nous amène au match chaotique de la Ligue des Nations de l’UEFA où l’Italie a accueilli l’équipe israélienne à Udine. Des publications virales sur les réseaux sociaux ont documenté la présence de snipers sur le toit du stade avant, pendant et après le match.
Tout cela se produit parce que la FIFA, l’UEFA et le CIO refusent d’appliquer leurs propres règles et principes à Israël, comme ils l’ont fait avec tant d’empressement lorsqu’ils ont puni la Russie et la Biélorussie sous la pression de l’Occident.
Tout cela n’est rien de nouveau pour personne. La question la plus urgente est la suivante : maintenant que nous avons établi que la lettre « I » de FIFA représente Israël, que devrait faire le monde civilisé concernant le sport en général et le football en particulier ?
Par son hypocrisie sanglante et son blanchiment sportif des crimes d’Israël, la FIFA a compromis l’âme de ce beau jeu, du moins à court terme.
Alors que l’image de Shaban al-Dalou, 19 ans, englouti par les flammes hante la conscience du monde civilisé, je me demande si, par une conséquence involontaire, la FIFA ne s’est pas définitivement fait du mal en tant qu’organisation sportive internationale.
Nima Tavallaey Roodsari est un journaliste spécialisé dans le football et animateur de podcasts basé en Suède. Il tweete sur @NimaTavRood