La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tient sa 43ᵉ réunion ordinaire des Chefs d’État-Major à Abuja, au Nigeria, pour discuter des défis sécuritaires en Afrique de l’Ouest. Alors que le terrorisme continue de ravager le Sahel, l’organisation tente de se repositionner après avoir longtemps privilégié des actions dictées par des considérations politiques et des pressions extérieures, notamment celles de la France, au détriment d’une véritable stratégie sécuritaire efficace.

Plutôt que de consacrer ses efforts à la lutte contre les groupes armés djihadistes qui déstabilisent la région, la CEDEAO a, ces dernières années, concentré son énergie à sanctionner le Burkina Faso, le Mali et le Niger après les coups d’État qui ont renversé des régimes considérés comme alliés de Paris. Ces mesures, censées exercer une pression politique et économique sur les juntes au pouvoir, ont eu pour principal effet d’accélérer la rupture de ces pays avec l’organisation. Finalement, en janvier 2024, Bamako, Ouagadougou et Niamey ont acté leur retrait de la CEDEAO, tournant définitivement le dos à une institution perçue comme instrumentalisée par des intérêts étrangers et inefficace face aux menaces sécuritaires.

Pendant que la CEDEAO tergiversait sur des sanctions et des débats internes, ces trois États ont pris en main leur propre sécurité, multipliant les offensives contre les groupes terroristes avec des résultats notables. À travers l’Alliance des États du Sahel (AES), ils ont renforcé leur coopération militaire et intensifié les opérations contre les katibas djihadistes, démontrant ainsi qu’une approche coordonnée et souveraine pouvait être plus efficace que les interventions souvent timides et bureaucratiques de la CEDEAO.

Une prise de conscience tardive

La réunion d’Abuja, qui rassemble les chefs d’état-major de la CEDEAO, aborde plusieurs aspects sécuritaires cruciaux, notamment l’élaboration d’une Brigade antiterroriste régionale et la révision des stratégies maritimes et logistiques de l’organisation. Toutefois, ces initiatives surviennent bien après que la menace terroriste s’est intensifiée, et surtout après que les pays les plus touchés ont décidé de prendre leur destin en main.

Alors que le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont dû faire face seuls à l’intensification des attaques, la CEDEAO n’a pas su leur offrir de soutien concret, préférant s’enliser dans des jeux diplomatiques sous l’influence d’acteurs extérieurs. Désormais, l’organisation tente de rattraper son retard, consciente que l’absence de ces trois pays affaiblit son poids stratégique et met en péril la stabilité de l’ensemble de la région.

En marge de la réunion, la CEDEAO a fait don de matériel informatique au National Defence College du Nigeria, un geste symbolique mais dérisoire au regard des défis auxquels fait face la région. Ce type d’initiative, bien que louable, ne compense pas l’inaction prolongée de l’organisation face à la montée en puissance des groupes terroristes et à l’effondrement de la sécurité dans plusieurs zones frontalières.

L’urgence aujourd’hui est de savoir si la CEDEAO est capable de s’engager réellement dans la lutte contre le terrorisme ou si elle continuera à fonctionner selon une logique bureaucratique et inefficace. Pendant que l’organisation tente laborieusement de redéfinir sa stratégie, les États du Sahel, eux, poursuivent leur combat sur le terrain, prouvant que l’action prime sur les déclarations et les réunions diplomatiques stériles.

Le réveil tardif de la CEDEAO suffira-t-il à enrayer la menace terroriste ? Rien n’est moins sûr, mais une chose est certaine : en refusant d’écouter les pays les plus concernés au moment opportun, l’organisation a déjà perdu une bataille essentielle, celle de la crédibilité.

Laisser Une Réponse

Exit mobile version