Une page se tourne dans l’histoire du Tchad. Le président de transition, Mahamat Idriss Déby Itno, a annoncé ce mercredi le « départ définitif et complet » des forces françaises du pays, marquant ainsi la fin d’une présence militaire qui aura duré plusieurs décennies. Cette annonce solennelle a été faite lors d’une cérémonie officielle, au cours de laquelle le chef de l’État a mis en avant la volonté du Tchad de consolider son indépendance et de prendre en main son propre destin sécuritaire.
La cérémonie, qui s’est tenue à N’Djamena, intervient au lendemain de la rétrocession de la base militaire Sergent Adji Kosseï aux autorités tchadiennes. Cette installation, qui servait de point central pour les opérations françaises au Sahel, notamment dans le cadre de l’opération Barkhane, est désormais sous contrôle exclusif des forces tchadiennes. Un moment hautement symbolique qui scelle la fin d’une étape et en ouvre une nouvelle dans les relations entre le Tchad et la France.
Dans son allocution, Mahamat Idriss Déby Itno a souligné que cette transition militaire constituait un jalon essentiel dans le renforcement de la souveraineté nationale. « Nous prenons aujourd’hui un tournant décisif pour l’indépendance de notre politique de défense et de sécurité. Le Tchad entend désormais assurer seul la protection de son territoire et de ses citoyens », a-t-il déclaré devant un parterre de dignitaires, de responsables militaires et de représentants de la société civile.
Un retrait dans un contexte régional mouvant
Le départ des troupes françaises s’inscrit dans un contexte plus large de réajustement de la présence militaire française en Afrique, notamment au Sahel, après des départs forcés du Mali, du Burkina Faso et du Niger sous la pression de régimes en rupture avec Paris. Si la coopération militaire entre le Tchad et la France avait jusqu’ici résisté aux tensions, les récents développements diplomatiques et les aspirations de souveraineté exprimées par N’Djamena ont finalement conduit à ce retrait.
Paris, de son côté, a pris acte de cette décision tout en réaffirmant son engagement à poursuivre des relations bilatérales « sur de nouvelles bases », axées sur la coopération économique et le développement. Toutefois, certains observateurs s’interrogent sur les conséquences de ce retrait pour la stabilité régionale, alors que le Sahel demeure confronté à une montée en puissance des groupes armés terroristes.
Un tournant pour la politique de défense tchadienne
Avec ce départ, le gouvernement tchadien doit relever un défi de taille : assurer la continuité de la sécurité dans un environnement marqué par des menaces persistantes, notamment à ses frontières avec le Niger, la Libye et la Centrafrique. Le rôle de l’armée nationale sera crucial, et des réformes structurelles pourraient être engagées pour renforcer les capacités militaires du pays.
En filigrane, ce départ marque aussi une évolution des alliances stratégiques du Tchad, qui pourrait diversifier ses partenaires en matière de défense et de sécurité. Plusieurs analystes évoquent la possibilité d’un rapprochement avec d’autres puissances militaires, notamment la Russie ou la Chine, qui cherchent à étendre leur influence sur le continent africain.
Le départ des forces françaises du Tchad ne constitue pas seulement un événement militaire, mais un moment charnière pour la souveraineté nationale et la reconfiguration des relations extérieures du pays. En tournant la page de la présence militaire française, N’Djamena envoie un message fort : celui d’un Tchad déterminé à tracer sa propre voie, dans un contexte où les dynamiques géopolitiques en Afrique connaissent de profondes mutations.