Le 31 décembre 2024, le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé un événement majeur pour les relations militaires entre la France et la Côte d’Ivoire. Dans un discours de fin d’année, il a confirmé que la base militaire française située à Abidjan, dans la commune de Port-Bouet, serait rétrocédée aux forces armées ivoiriennes dès janvier 2025. Cette décision s’inscrit dans le cadre de la réorganisation de la présence militaire française en Afrique, un tournant symbolique dans le processus de réajustement des relations entre l’ancienne puissance coloniale et ses ex-colonies.

La rétrocession de la base du 43e Bataillon d’infanterie de marine (BIMA) à la Côte d’Ivoire représente bien plus qu’un simple transfert de pouvoir militaire. Elle marque la fin d’une époque d’hégémonie française sur le continent africain, particulièrement en Afrique de l’Ouest. Après avoir été expulsée de plusieurs pays sahéliens par des juntes militaires opposées à la présence française, la France semble redéfinir ses priorités militaires en Afrique.

En effet, cette décision fait suite à un processus entamé avec les récents retraits militaires de la France du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Ces pays, désormais sous contrôle de régimes militaires, ont affirmé leur volonté d’éloigner la France, qui était présente dans la région pour lutter contre les groupes djihadistes. Le retrait français en Afrique subsaharienne, déjà amorcé, s’étend désormais aux anciennes bases militaires du Sahel, avec notamment la rétrocession d’une première base au Tchad, en décembre 2024.

Le président Ouattara a souligné que la modernisation de l’armée ivoirienne était désormais achevée, ce qui a permis à la Côte d’Ivoire de reprendre le contrôle de cette base stratégique. « Nous pouvons être fiers de notre armée dont la modernisation est désormais effective », a-t-il déclaré, ajoutant que le camp du 43e BIMA serait désormais un symbole de la souveraineté ivoirienne. Ce camp sera d’ailleurs baptisé en l’honneur du général Thomas d’Aquin Ouattara, le premier chef d’état-major de l’armée ivoirienne, soulignant ainsi un tournant historique dans l’histoire militaire de la Côte d’Ivoire.

La Côte d’Ivoire, un allié clé dans un contexte régional en mutation

Malgré ce retrait militaire, la Côte d’Ivoire demeure un allié stratégique pour la France en Afrique de l’Ouest. Le pays, bien que devant désormais assumer la gestion de ses propres affaires sécuritaires, conserve un rôle clé dans la lutte contre les menaces djihadistes qui déstabilisent la région. Les soldats français, notamment ceux stationnés au sein du 43e BIMA, étaient engagés dans des opérations de lutte contre les groupes terroristes qui frappent non seulement le Sahel, mais aussi les pays du golfe de Guinée.

Cependant, l’évolution des relations entre la France et ses anciennes colonies se fait sur fond de défiance croissante, notamment en raison des événements récents. Le départ des troupes françaises du Mali, du Burkina Faso et du Niger, a alimenté un sentiment nationaliste en Afrique, poussant certains régimes à rechercher une réorientation de leurs alliances, parfois en direction de puissances rivales comme la Russie ou la Chine.

Alassane Ouattara, tout en abordant ce nouveau chapitre de l’histoire de son pays, a aussi évoqué l’élection présidentielle d’octobre 2025. Il a assuré que ce processus se déroulerait dans un climat « apaisé », « transparent et démocratique ». À la veille de ses 83 ans, le président n’a pas encore annoncé s’il briguerait un quatrième mandat, mais cette incertitude politique vient ajouter une dimension supplémentaire aux bouleversements en cours.

Ce retrait militaire en Côte d’Ivoire et dans d’autres pays de la région s’inscrit dans un contexte plus large de recomposition géopolitique. La France, autrefois perçue comme un acteur incontournable du continent africain, se voit désormais contrainte de redéfinir son rôle face à une Afrique de plus en plus indépendante et en quête de nouvelles alliances. La fin de l’hégémonie française est tangible, et ce qui s’ouvre aujourd’hui pourrait bien être une ère nouvelle, où l’Afrique dessine elle-même son avenir, loin des influences passées.

Le 43e BIMA ne sera plus un symbole de la présence militaire française en Afrique. Désormais, sous le drapeau ivoirien, il incarnera la transition vers une Afrique souveraine et plus résolue à gérer ses propres affaires de sécurité et de politique extérieure. Un changement profond, porteur de significations multiples, se profile pour la France, la Côte d’Ivoire, et l’ensemble du continent africain.

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