Malgré sa défaite cuisante aux élections législatives de novembre 2024, Macky Sall n’a pas tourné le dos à la scène politique sénégalaise. Depuis Marrakech au Maroc, où il réside depuis la sa défaite lors de législatives, après la présidentielle, l’ancien président organise discrètement sa défense face à l’ouragan d’une batterie d’accusation qui serait en téléchargement, comme on dit au Sénégal. Accusé de corruption, de favoritisme économique en faveur des puissances occidentales et de haute trahison, Macky Sall est aujourd’hui la cible d’une fronde populaire, particulièrement virulente parmi la jeunesse sénégalaise, qui le dénonce comme « ennemi de la nation ».
Depuis Marrakech, Macky Sall multiplie les consultations avec des proches du parti de l’Alliance pour la République (APR) et des conseillers juridiques de renom. Au cœur de son dispositif, El Hadji Amadou Sall, ancien ministre de la Justice sous Abdoulaye Wade (2009-2010) et avocat chevronné, connu pour avoir défendu Karim Wade lors de son procès pour enrichissement illicite en 2015.
Ce dernier a constitué en septembre 2024 un collectif baptisé « Collectif des Avocats Républicains », dont l’objectif est de protéger juridiquement les anciens collaborateurs de Macky Sall face à ce qu’ils considèrent comme une chasse aux sorcières. Parmi les membres influents de ce collectif figurent également Omar Youm, ancien ministre des Transports et des Forces armées, ainsi que les avocats éminents El Hadji Moustapha Diouf et Bassirou Ngom, autrefois alliés de l’APR.
Bien qu’aucune procédure judiciaire n’ait été officiellement ouverte contre Macky Sall, l’attention du collectif se concentre sur des affaires impliquant ses proches. Ces dossiers pourraient avoir des répercussions directes sur l’ancien président, fragilisant davantage son image.
Soupçons de blanchiment d’argent
Parmi les affaires récentes les plus explosives, celle de Farba Ngom retient l’attention. Surnommé « le griot » de Macky Sall, cet influent maire-adjoint des Agnams et principal pourvoyeur de fonds de l’APR, fait face à des accusations de blanchiment d’argent. Les sommes en question, estimées à plus de 190 millions d’euros, ont conduit l’Assemblée nationale à engager, le 16 janvier, une procédure visant à lever son immunité parlementaire. Une telle décision ouvrirait la voie à des poursuites judiciaires.
Pour se défendre, Macky Sall ne mise pas uniquement sur le soutien de ses conseillers locaux. Il a fait appel à Antoine Vey, un avocat français renommé. Ce dernier a déposé une plainte en diffamation mi-décembre 2024, après la diffusion de documents présumés falsifiés attribuant à Macky Sall la propriété d’un compte bancaire basé à Singapour.
Malgré ses dénégations et ses stratégies de communication, Macky Sall peine à regagner la confiance d’une grande partie de la population. La jeunesse, en particulier, lui reproche sa politique économique jugée favorable aux entreprises occidentales, aux dépens des intérêts nationaux. La gestion controversée des marchés publics et des contrats stratégiques alimente une colère sociale de plus en plus palpable.
Ces accusations résonnent également dans un contexte où le nouveau président, Bassirou Diomaye Faye, s’emploie à redéfinir les priorités économiques et à renforcer les mécanismes de transparence. Cependant, les défis restent immenses, et les conséquences de la présidence de Macky Sall continuent de peser lourdement sur le climat politique et économique.
Bien qu’éloigné de Dakar depuis avril, Macky Sall conserve une présence sur la scène internationale. Il est attendu à Washington pour assister à l’investiture du président américain Donald Trump le 20 janvier 2025. Ce déplacement pourrait être l’occasion pour l’ancien président de renouer avec des soutiens diplomatiques dans un moment critique de sa carrière politique.
Si Macky Sall espère trouver dans ses alliances internationales une forme de réhabilitation, le chemin semble encore long pour effacer les stigmates d’une gestion présidentielle marquée par les controverses. Le peuple sénégalais, en quête de justice et de réformes, attend des réponses concrètes face à des accusations qui continuent de ternir l’image d’un leader jadis porté en héros national.