samedi, septembre 13

Le monde contemporain traverse une phase de recomposition accélérée.

L’ordre international, marqué par la montée de nouveaux pôles d’influence et la remise en cause des architectures multilatérales héritées de l’après-1945, se reconfigure dans un enchaînement de crises. Loin de suivre une trajectoire linéaire, cette transition se déploie par à-coups, entre accélérations brutales et brusques ralentissements. Pour les pays africains, l’enjeu n’est pas seulement d’y survivre mais de savoir transformer ces bouleversements en leviers d’affirmation stratégique.

Selon l’universitaire Allen, spécialiste des dynamiques internationales, les crises actuelles – qu’elles se situent au Proche-Orient, en Europe ou en Asie – ne font qu’accélérer ou freiner des tendances déjà à l’œuvre depuis plusieurs années. « Les grands courants demeurent », explique-t-il, « mais ils sont ponctués par des secousses qui précipitent certains développements ou en bloquent d’autres ». Pour l’Afrique, ces convulsions ne représentent pas mécaniquement des opportunités. Elles n’en deviennent telles que si les dirigeants savent les analyser, identifier les gains potentiels et disposer des capacités nécessaires pour les transformer en avantages.

Le continent peine encore à parler d’une seule voix. L’Union africaine se veut la courroie de transmission d’une vision commune, mais ce sont surtout les États, avec leurs intérêts propres, qui dessinent la posture stratégique africaine. Dans le contexte actuel, l’un des champs où cette posture pourrait s’affirmer concerne les ressources critiques. Lithium, cobalt, terres rares : autant de matières premières indispensables à la transition énergétique mondiale et qui confèrent à l’Afrique un rôle de premier plan. L’enjeu est de dépasser la logique de rente extractive pour l’arrimer à la dynamique industrielle et climatique mondiale.

Historiquement cantonné au rôle de suiveur, le continent entend désormais peser davantage dans la fabrique des normes internationales. S’il reste limité sur le plan militaire, l’Afrique détient le plus grand bloc régional de voix à l’Assemblée générale des Nations unies, ce qui en fait un acteur clé dans la défense du multilatéralisme. En insistant sur le respect du droit international et la coopération, les États africains cherchent à infléchir les règles du jeu, dans un contexte où les institutions sont contestées mais indispensables.

Les appels africains à la réforme du Conseil de sécurité ou du système financier mondial ne relèvent plus d’un débat académique. « Le système est en panne », souligne Allen, « et l’inaction mine sa crédibilité ». L’Afrique, forte de son poids démographique et politique, peut exercer une pression collective pour revitaliser les mécanismes onusiens et y obtenir une représentation accrue. Cette convergence des intérêts africains sur la réforme des institutions multilatérales est l’un des rares terrains où l’unité continentale semble possible, malgré les rivalités persistantes.

Si l’on devait retenir une menace structurante pour l’Afrique à l’horizon de la prochaine décennie, c’est bien le changement climatique. Ses effets touchent à la viabilité même des économies et des sociétés, accentuant vulnérabilités et tensions. Mais c’est aussi dans ce champ que le continent peut affirmer son rôle, en liant ses ressources stratégiques à la transition énergétique mondiale. L’autre opportunité, selon Allen, réside dans la capacité à peser sur la réforme de l’ONU et du multilatéralisme. Pour la première fois, l’Afrique dispose d’une fenêtre historique pour contribuer à redéfinir les règles du système international.

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