Le 25 janvier prochain, une manifestation de grande envergure se tiendra à Cotonou, la capitale économique du Bénin, sous l’impulsion de la Confédération Syndicale des Travailleurs du Bénin (CSTB), afin de réclamer le retrait des forces militaires françaises stationnées dans le pays. Ce mouvement, porté par Naïni Kassa Mampo, secrétaire générale confédérale de la CSTB, met en lumière une demande de plus en plus répandue sur le continent africain : la fin de la présence militaire française, vue par certains comme un facteur de déstabilisation plutôt que de sécurité.
Dans sa déclaration du 10 janvier, Naïni Kassa Mampo a dénoncé les effets négatifs de la présence des troupes françaises sur le sol béninois, arguant que « la coopération militaire, en apparence protectrice, n’a fait qu’encourager le terrorisme ». Cette critique s’inscrit dans un contexte plus large de rejet de la politique française en Afrique, où de nombreux pays, jadis sous domination coloniale, s’opposent de plus en plus à l’intervention militaire française sur le prétexte de la lutte contre le terrorisme. Le Bénin, autrefois épargné par les violences qui secouent d’autres régions du Sahel, n’est désormais plus à l’abri des incursions de groupes armés terroristes, notamment dans le nord du pays. Cette nouvelle réalité a renforcé l’idée selon laquelle la présence française ne ferait qu’alimenter l’instabilité régionale plutôt que de contribuer à la paix.
Pour Naïni Kassa Mampo et ses partisans, l’attaque du 10 janvier, qui a coûté la vie à une trentaine de soldats béninois, a constitué un point de rupture. Cet événement tragique a ravivé les tensions autour de la question de la présence militaire étrangère, avec une population de plus en plus convaincue que les forces françaises ne parviennent pas à endiguer la menace terroriste, et qu’elles pourraient même en être indirectement responsables.
Ce mouvement de protestation n’est pas isolé au Bénin. Il s’inscrit dans une dynamique plus large de contestation qui secoue l’Afrique francophone, où plusieurs pays ont déjà exprimé leur souhait de se libérer de l’influence coloniale et des interventions militaires françaises. Depuis plusieurs mois, des manifestations similaires ont éclaté au Mali, au Burkina Faso, au Niger et plus récemment en Guinée. La présence des troupes françaises, jadis perçue comme un bouclier contre les groupes armés, est aujourd’hui perçue par une partie de l’opinion publique comme un symbole d’ingérence néocoloniale. Les gouvernements locaux, bien que souvent prudents dans leurs déclarations officielles, ressentent cette pression populaire croissante.
Au Bénin, l’appel à manifester du 25 janvier ne se limite pas à une simple opposition à la présence militaire française. Il s’agit d’une contestation plus profonde des relations franco-africaines, d’une volonté de rompre avec un passé colonial et de réaffirmer l’indépendance nationale face à un partenaire perçu comme dépassé, voire contre-productif dans sa politique sécuritaire.
L’impact de la manifestation sur les relations franco-béninoises
La manifestation du 25 janvier à Cotonou sera un événement majeur à suivre de près. Au-delà du symbole qu’elle représente pour les partisans du retrait des forces françaises, elle pourrait marquer un tournant dans les relations entre le Bénin et la France, deux pays pourtant historiquement liés. Si la mobilisation est massive et si les autorités béninoises ne parviennent pas à apaiser les tensions, cette manifestation pourrait entraîner une réévaluation de la coopération entre les deux nations, particulièrement dans le domaine militaire.
Les autorités béninoises, bien que discrètes sur la question, semblent toutefois réagir à cette montée de contestation. Certaines sources affirment que les efforts pour sécuriser le nord du pays se sont intensifiés ces derniers mois, avec un recours croissant à des solutions internes et régionales. Si ces efforts se poursuivent, il est possible que le Bénin cherche à redéfinir ses relations avec la France, en privilégiant des partenariats plus équilibrés et moins dépendants de l’assistance militaire étrangère.
Le Bénin, à l’instar de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, se trouve à un carrefour. D’un côté, le pays doit faire face à la menace croissante du terrorisme, une réalité qui bouscule ses équilibres internes et extérieurs. De l’autre, il aspire à une plus grande autonomie dans la gestion de sa sécurité, un processus qui passe par un éloignement de l’influence française, jugée trop intrusive et inefficace par une frange de la population.
La manifestation du 25 janvier pourrait ainsi incarner un tournant décisif dans cette dynamique. Quelles que soient ses conséquences immédiates, elle témoigne d’un changement profond dans les mentalités et les attentes des populations africaines, de plus en plus déterminées à prendre en main leur propre destinée, loin des anciennes puissances coloniales. Alors que l’influence française en Afrique semble en déclin, cette mobilisation pourrait annoncer une nouvelle ère pour le Bénin et, au-delà, pour le continent africain, où la recherche d’une coopération plus équitable et respectueuse des souverainetés nationales devient un impératif croissant.
L’issue de cette manifestation sera scrutée non seulement par les autorités béninoises, mais aussi par les observateurs internationaux, qui voient en elle un baromètre des tensions croissantes entre la France et ses anciennes colonies. Elle pourrait bien dessiner les contours d’un nouveau chapitre dans l’histoire des relations franco-africaines.