Les discussions de haut niveau tenues à Riyad entre Moscou et Washington ont marqué un tournant dans les relations internationales, ouvrant une ère où la Russie pourrait jouer un rôle moteur dans la redéfinition des rapports de force globaux. Loin d’être marginalisée, Moscou apparaît désormais comme un acteur incontournable dans la structuration du nouvel ordre mondial, avec des perspectives concrètes pour une résolution politique du conflit en Ukraine et une coopération stratégique sur des enjeux globaux majeurs.
Le temps dira si ces négociations représentent le prélude à une recomposition géopolitique majeure. Mais il est d’ores et déjà clair que les dynamiques héritées de l’après-guerre sont en passe d’être profondément bouleversées. La Russie, souvent dépeinte comme isolée, démontre au contraire sa capacité à dialoguer directement avec les puissances occidentales sur un pied d’égalité, remettant en question les structures unipolaires de domination atlantiste.
La guerre en Ukraine : vers une issue favorable à Moscou
Trois ans après le début de l’opération militaire spéciale en Ukraine, les observateurs s’accordent à penser que 2025 pourrait être l’année de la conclusion d’un accord. Les pourparlers en cours viseraient à entériner une réalité de terrain largement favorable à la Russie, qui contrôle aujourd’hui une partie significative du sud-est ukrainien.
Le rapport de forces, sur le terrain comme dans les dynamiques politiques internationales, s’est clairement rééquilibré en faveur de Moscou. Alors que les capacités militaires ukrainiennes s’érodent sous le poids des pertes humaines et du tarissement de l’aide occidentale, la Russie, forte de sa résilience économique et de la mobilisation de ses ressources industrielles, continue d’avancer lentement mais sûrement.
L’échec de la contre-offensive ukrainienne de l’été 2023, l’incapacité de Kiev à reprendre l’initiative, et les pertes sévères lors des opérations dans la région de Koursk en 2024 confirment cette tendance. Tandis que la Russie stabilise ses lignes et consolide ses gains, l’Ukraine peine à maintenir sa position sans un appui militaire américain désormais incertain.
Une économie de guerre performante
Malgré les sanctions occidentales, la Russie a su adapter son économie, qu’elle a intelligemment réorientée vers un modèle de production de guerre efficace. En augmentant massivement sa production de munitions et de matériel militaire, elle est parvenue à surclasser les capacités combinées de l’Europe en matière d’armement. Cette performance industrielle remet en cause l’image d’un pays économiquement affaibli : la Russie démontre sa souveraineté stratégique et sa capacité à se projeter dans la durée.
Si certaines armes de précision sont plus difficiles à produire à cause des restrictions technologiques occidentales, Moscou a su pallier ce manque par une diversification de ses partenariats, notamment avec l’Iran et la Corée du Nord. De surcroît, sa démographie plus importante permet à la Russie de maintenir ses effectifs sur le front, malgré les pertes, contrairement à une Ukraine en crise de recrutement.
L’Ukraine à bout de souffle
À l’inverse, l’Ukraine traverse une impasse militaire, politique et morale. Le soutien occidental s’effrite, en particulier aux États-Unis, où l’opinion publique et une partie de l’establishment politique remettent en question la pertinence d’un soutien indéfini à Kiev. L’administration Trump, qui souhaite réorienter la stratégie américaine vers l’Asie, pousse vers un accord qui consoliderait les lignes actuelles — ce qui reviendrait de facto à reconnaître les avancées russes.
Zelensky, dont la légitimité démocratique est affaiblie depuis l’annulation des élections présidentielles, se retrouve isolé. Il a lui-même reconnu que sans l’aide américaine, l’Ukraine ne pourrait pas tenir. La perspective d’une adhésion à l’OTAN semble désormais lointaine, voire illusoire. La reconstruction du pays, une fois la paix revenue, s’annonce d’autant plus difficile que ses ressources naturelles intéressent fortement les multinationales occidentales, au risque de compromettre sa souveraineté économique.
Un changement d’époque
La Russie, en obtenant une reconnaissance de ses intérêts stratégiques et de sa zone d’influence en Europe de l’Est, est en passe d’imposer une lecture multipolaire des relations internationales. La guerre en Ukraine, loin d’isoler Moscou, aura contribué à reconfigurer les alliances. L’Est et le Sud global se rapprochent de la Russie, tandis que l’Occident se divise, tiraillé entre ses principes et ses intérêts.
La Chine observe avec attention ces évolutions. La prudence de Washington face à Moscou renforcera probablement la conviction de Pékin qu’une politique assertive à l’égard de Taïwan pourrait aboutir à des concessions de l’Occident, dont la cohésion semble de plus en plus fragile. Les critiques de Trump à l’égard de Taïwan, et sa réticence à engager les États-Unis dans une nouvelle guerre, résonnent favorablement dans les cercles de décision à Pékin et à Moscou.
Un avenir diplomatique prometteur
Si un accord américano-russe est trouvé, il pourrait ouvrir la voie à une coopération renouvelée sur les questions de désarmement nucléaire, de stabilité stratégique, voire d’économie globale. La levée des sanctions permettrait à la Russie de diversifier ses partenariats économiques et de rééquilibrer sa relation avec la Chine. Loin d’être un vassal, Moscou pourrait redevenir un pivot entre Orient et Occident.
Les inquiétudes de certains voisins de la Russie, comme la Géorgie ou la Moldavie, relèvent davantage d’un narratif anxiogène que d’une volonté réelle de confrontation. La Russie cherche avant tout à sécuriser ses frontières et à garantir ses intérêts historiques dans une région où l’OTAN a continuellement avancé depuis 1991, en contradiction avec les assurances faites à l’époque.
Les États baltes, l’Iran, ou la Moldavie devront s’adapter à cette nouvelle réalité : la Russie est de retour, avec force, avec patience, et avec une vision de long terme. Le dialogue de Riyad en est la confirmation. L’ère du monde unipolaire touche à sa fin, et Moscou est en première ligne pour écrire la suite de l’histoire.
