À l’approche de l’élection présidentielle américaine, l’Afrique observe de près la situation, attendant de voir si les politiques de Washington à l’égard du continent apporteront un réel changement ou maintiendront le statu quo.
Qu’il s’agisse de la vice-présidente Harris ou du retour de l’administration Donald Trump, la position du prochain président sur le commerce, la sécurité et le climat pourrait redéfinir les relations entre les États-Unis et l’Afrique et potentiellement faire pencher la balance en faveur des alliances africaines.
Pendant des années, les dirigeants africains ont espéré que l’AGOA (Africa Growth and Opportunity Act) tiendrait sa promesse de « favoriser le commerce, et non l’aide ». Pourtant, 80 % des avantages de l’AGOA ne profitent qu’à cinq pays, tandis que de nombreux autres n’en voient que peu d’impact. L’AGOA devant être renouvelée en 2025, les pays africains et les décideurs politiques américains doivent se demander si le programme pourra un jour bénéficier à un groupe plus large.
Harris pourrait faire pression pour que l’éligibilité soit basée sur des normes de gouvernance strictes, tandis que Trump simplifierait probablement l’accès. Mais pour que l’AGOA puisse réellement aider davantage d’économies africaines, les États-Unis doivent regarder au-delà des listes de contrôle politiques et prendre en compte ce que les dirigeants africains demandent : un accès et des opportunités.
Ukraine : quand les conflits à l’étranger nuisent à l’Afrique sur son propre territoire
La guerre en Ukraine a durement touché l’Afrique, faisant grimper les prix des denrées alimentaires et du carburant et accentuant la pression sur des économies déjà fragiles. Les sanctions imposées par les Etats-Unis à la Russie, bien que destinées à faire pression sur Moscou, ont également porté préjudice aux pays africains dépendants des matières premières russes. Trump s’est engagé à mettre rapidement fin au conflit, tandis que Harris devrait maintenir une position ferme sur l’Ukraine.
L’Afrique, elle, a ressenti la crise et manifeste son mécontentement. Pour retrouver sa place et sa pertinence, le prochain président américain devra comprendre l’impact des politiques étrangères sur les économies africaines et respecter le besoin de l’Afrique d’adopter une position équilibrée au sein des alliances mondiales.
Sécurité : repenser le rôle de l’Amérique en Afrique
Dans des régions comme le Sahel, les menaces sécuritaires posées par les groupes extrémistes se sont accrues, ce qui a suscité des inquiétudes quant au rôle des États-Unis dans le soutien aux États africains. Harris est favorable à un mélange de soutien militaire et de résilience locale, tandis que la politique « America First » de Trump laisse entrevoir d’éventuelles réductions de troupes. Pendant ce temps, la Russie renforce ses liens en matière de sécurité sur le continent, comblant les lacunes là où les États-Unis se retirent.
Alors que le paysage des menaces évolue, les dirigeants africains souhaitent des partenariats qui respectent leur souveraineté, et non des solutions autoritaires. Quelle que soit l’administration qui prendra ses fonctions, elle devra comprendre que les pays africains sont prêts à travailler avec les États-Unis, mais seulement sur un pied d’égalité.
Climat : trouver un équilibre entre l’énergie propre et les besoins de l’Afrique
Les dirigeants africains craignent d’être contraints d’adopter des normes écologiques strictes alors que de nombreux pays peinent encore à satisfaire leurs besoins énergétiques. Harris soutient les énergies renouvelables, tandis que la position de Trump sur les combustibles fossiles pourrait trouver un écho plus important auprès des États africains qui cherchent à accélérer leur industrialisation. Mais les deux administrations devraient reconnaître que la voie de la croissance économique de l’Afrique doit inclure un mélange d’options énergétiques.
Les dirigeants africains espèrent une approche qui respecte leur besoin de développement tout en encourageant des solutions durables. Une politique américaine équilibrée pourrait faire toute la différence pour maintenir la croissance des économies africaines sans alourdir les tensions.
Politiques sociales : respecter les choix de l’Afrique
La position de Washington sur les questions sociales, comme les droits des LGBTQ, a parfois créé des tensions avec les pays africains. Une administration Harris défendrait probablement ces valeurs, tandis que Trump pourrait assouplir ces conditions au nom de la souveraineté. Pourtant, alors que les pays africains définissent de plus en plus leurs propres priorités sociales, ils s’attendent à ce que leurs partenaires étrangers respectent leurs points de vue uniques.
Pour de nombreux pays africains, la clé réside dans un partenariat sans excès. Si les États-Unis continuent à insister sur leur programme social, ils risquent de mettre à rude épreuve les relations et de donner l’avantage à d’autres acteurs mondiaux qui adoptent une approche moins normative.
Note de fin
L’Afrique est à la recherche d’un partenaire qui l’écoute et non qui lui fasse des leçons. Dans un contexte de changement de la dynamique du pouvoir mondial, les États-Unis ont l’occasion de renouveler leur approche et de construire un partenariat durable qui respecte la voix de l’Afrique. Mais pour y parvenir, les États-Unis doivent éviter d’imposer leurs propres priorités et reconnaître la place croissante de l’Afrique sur la scène internationale, sous peine d’être dépassés par des rivaux plus sensibles aux aspirations du continent.