Dans un contexte international marqué par des bouleversements stratégiques, le Niger se retrouve au centre d’une réorientation diplomatique majeure. Selon les informations exclusives d’Africa Intelligence, des négociations confidentielles ont été engagées entre la junte nigérienne et l’Iran pour la livraison de 300 tonnes de concentré d’uranium, communément appelé « yellow cake ». Ce dossier, d’une sensibilité extrême, attire l’attention de l’administration américaine dirigée par Joe Biden, plaçant le groupe français Orano dans une position délicate.
La situation a pris une tournure inattendue suite à la visite de Molly Phee, secrétaire d’État adjointe aux Affaires africaines, à Niamey. Accompagnée de hauts fonctionnaires américains, elle n’a pas réussi à établir un dialogue constructif avec les autorités nigériennes. Plusieurs points de discorde ont été identifiés, notamment la pression américaine pour un calendrier électoral accéléré, l’aversion pour l’influence russe croissante et, enfin, le développement rapide des liens avec l’Iran. Face à ce qu’il considère comme une ingérence, le CNSP a rompu l’accord de coopération en vigueur depuis 2012.
Les relations avec la France ont également subi un coup dur, aboutissant à une rupture complète des liens diplomatiques. L’ambassade de France à Niamey a été fermée et son personnel rapatrié, tandis que l’ambassadrice nigérienne à Paris a été relevée de ses fonctions sans désignation de successeur.
Le Niger semble résolu à redéfinir son agenda diplomatique, se détournant des partenaires occidentaux traditionnels tels que la France, les États-Unis et l’Union européenne, ainsi que des alliés africains. Les relations avec la Cedeao et le Nigeria, partenaire historique, se sont également détériorées. Le gouvernement nigérien s’oriente désormais vers de nouveaux alliés, notamment l’Alliance des États du Sahel, la Russie et l’Iran.
La visite du Premier ministre Ali Mahaman Lamine Zeine à Moscou en janvier dernier témoigne de cette nouvelle orientation. Le Niger envisage d’acquérir du matériel militaire russe et de bénéficier de l’expertise russe pour la formation de ses troupes. D’autres domaines de coopération sont également explorés, tels que l’agriculture, la pharmacie, la recherche et la santé.
Avec le retrait progressif des puissances occidentales, la Russie pourrait chercher à se tailler une part des ressources naturelles nigériennes, notamment l’uranium, dont le Niger est le troisième producteur mondial. L’uranium revêt une importance particulière pour la Russie, qui souhaite développer son secteur nucléaire civil et militaire.
Le rapprochement avec l’Iran s’inscrit dans une logique similaire. Présente de longue date au Niger via des ONG soutenant les organisations islamiques, la République islamique d’Iran saisit l’opportunité créée par le désamour envers l’Occident pour renforcer sa position, notamment dans le secteur énergétique. Le Niger, qui importe 70 % de son électricité du Nigeria, cherche à réduire cette dépendance, d’autant plus après avoir ressenti les effets des sanctions de la Cedeao. Le secteur de l’énergie, y compris le nucléaire et l’éolien, reste largement inexploité, offrant des opportunités aux entreprises iraniennes.
Cette convergence d’intérêts s’inscrit également dans un contexte idéologique, le Niger devenant un terrain d’influence privilégié dans la rivalité régionale avec l’Arabie saoudite.