Tandis que le cabinet britannique fait preuve de transparence concernant la progression d’un projet ambitieux d’exportation d’énergie renouvelable depuis le Maroc au moyen d’un câble sous-marin, le silence du gouvernement marocain est remarquable.
Ce projet, conçu par la jeune entreprise britannique Xlinks, deviendrait le câble électrique sous-marin le plus étendu du globe, mesurant 3 900 kilomètres de longueur.
Il engendrerait des revenus annuels de 1,5 milliard de dollars pour le Maroc, pays doté de ressources considérables en énergie solaire et éolienne dans la région méridionale de Guelmim-Oued Noun. Néanmoins, les termes et bénéfices de cet accord pour le royaume demeurent incertains.
Fondée en 2019 par Simon Morrish, ex-consultant pour McKinsey et Morgan Stanley, Xlinks a su rallier des personnalités éminentes, telles que James Humfrey (ex-Shell et Adnoc), Dave Lewis (ex-Unilever), Paddy Padmanathan (ex-Acwa Power) et Ian Davis (ex-Rolls-Royce plc).
En tant que développeur, Xlinks ne possède pas les fonds nécessaires pour financer les divers éléments du projet colossal, qui requiert un investissement de 22 milliards de livres sterling, dépassant l’estimation initiale de 18 milliards. D’où la recherche de partenaires financiers.
Le projet a éveillé l’intérêt de grands acteurs internationaux, tels que Total Energies, TAQA et NBO, qui ont investi dans Xlinks First, chargée de la production et du transport de l’électricité verte.
Le groupe britannique Octopus, spécialisé dans la distribution d’énergie renouvelable, s’est joint au projet en tant que client potentiel. Xlinks First a également créé une filiale marocaine, Xlinks Morocco, qui possédera les actifs d’énergies renouvelables dans la région de Guelmim-Oued Noun. La constellation Xlinks inclut aussi XLCC, qui produira le câble dans une usine à construire en Écosse.
Le gouvernement britannique, ayant intégré le projet dans sa stratégie énergétique pour 2030, a constitué une équipe dédiée à l’évaluation de sa faisabilité et de sa contribution à la sécurité énergétique nationale.
Cependant, le projet doit franchir une étape décisive : la signature d’un « Contract for Difference (CFD) », garantissant à Xlinks un tarif préférentiel pour la vente de l’électricité sur 25 ans. Ce contrat devrait être précédé d’un accord intergouvernemental entre le Maroc et le Royaume-Uni, définissant les engagements et avantages réciproques.
Le gouvernement marocain, qui n’a pas encore attribué au projet le statut stratégique prévu par la nouvelle législation sur l’investissement, reste discret sur l’avancement des négociations et les profits escomptés. Certains analystes redoutent que le projet ne constitue une forme de néocolonialisme, où le Maroc céderait ses ressources naturelles sans bénéfice réel.
D’autres mettent en avant les retombées positives pour le développement des régions méridionales et du secteur industriel. Le projet générerait des milliers d’emplois et stimulerait le développement socio-économique de ces zones.
Il positionnerait aussi le Maroc en tant que leader régional des énergies renouvelables et partenaire fiable du Royaume-Uni et de l’Union européenne dans la transition énergétique, renforçant son influence géopolitique et ses relations diplomatiques.
Pour tirer parti de ces avantages, le Maroc doit contribuer activement. Il doit instaurer un climat propice aux investissements et convaincre de rejoindre l’écosystème Xlinks. Il doit aussi conclure un accord équitable avec le Royaume-Uni, respectueux de ses intérêts et de sa souveraineté.
Il est également impératif de développer les capacités industrielles pour bénéficier du transfert technologique et de l’intégration locale. Enfin, il est essentiel de gérer les ressources en énergies renouvelables de manière durable et responsable.