À l’aube de son second mandat, Donald Trump semble enfin prêt à réévaluer sa politique africaine, longtemps jugée marginale durant son premier mandat. Alors que des noms circulent pour occuper des postes stratégiques dans une potentielle task force africaine, la question demeure : Trump accordera-t-il réellement à l’Afrique une place prépondérante dans ses priorités géopolitiques ? Plusieurs indicateurs, tant internes qu’externes, donnent à réfléchir sur l’ampleur de cet engagement.
Si Donald Trump a été souvent critiqué pour son manque d’engagement envers l’Afrique durant son premier mandat, la création d’une task force africaine pourrait signifier un tournant dans les relations des États-Unis avec le continent. Une structure dédiée pourrait en effet répondre à des enjeux de taille : d’un côté, une concurrence croissante de la Chine et de la Russie, de l’autre, des défis géopolitiques et sécuritaires nécessitant une intervention américaine plus ciblée.
Cependant, à ce stade, les ambitions de cette task force restent floues. Trump, connu pour son pragmatisme et sa préférence pour des résultats immédiats, semble plus enclin à l’idée d’un partenariat économique que d’un véritable engagement diplomatique de long terme. C’est ainsi que plusieurs experts estiment que cette task force pourrait se concentrer principalement sur les opportunités économiques, les investissements dans les infrastructures et le renforcement de la présence des entreprises américaines en Afrique. Mais pour Trump, la question cruciale demeure : l’Afrique sera-t-elle une simple variable d’ajustement dans une compétition mondiale ou un pilier stratégique dans sa politique extérieure ?
Plusieurs noms circulent pour intégrer cette task force, ce qui pourrait indiquer un retour à une diplomatie plus structurée envers l’Afrique. Parmi les personnalités pressenties pour ces postes influents, plusieurs se sont déjà exprimées sur leurs attentes concernant l’avenir des relations entre les États-Unis et le continent.
Cameron Hudson, ancien directeur des affaires africaines au National Security Council sous George W. Bush, a déclaré que l’un des plus grands défis de la politique américaine en Afrique résidait dans la nécessité de « concilier les intérêts économiques avec les enjeux sécuritaires complexes ». Hudson pourrait ainsi jouer un rôle clé dans l’évaluation et la mise en œuvre de politiques régionales visant à renforcer la sécurité tout en facilitant les investissements américains.
Peter Pham, ancien envoyé spécial pour la région du Sahel et l’Afrique de l’Ouest, a mis en lumière la nécessité d’une approche intégrée de la lutte contre le terrorisme. Selon Pham, « un partenariat renforcé dans le domaine de la sécurité, notamment en matière de renseignement et de formations militaires, est essentiel pour contrer l’expansion des groupes terroristes en Afrique ». Cette expertise sera cruciale dans la gestion des crises sécuritaires qui secouent l’Afrique subsaharienne.
Joshua Meservey, ancien directeur des affaires africaines au Hudson Institute, s’est quant à lui exprimé sur l’opportunité de redéfinir les relations économiques avec l’Afrique. Il a souligné que « les États-Unis doivent se concentrer sur les investissements dans les infrastructures critiques, tout en veillant à soutenir la bonne gouvernance et la stabilité politique des États africains ». Meservey représente ainsi une voix influente en faveur de relations axées sur les échanges commerciaux mais également sur des valeurs de démocratie et de transparence.
De leaders africains dans l’attente d’un engagement plus actif
La réélection de Donald Trump a suscité des réactions diverses parmi les dirigeants africains, qui espèrent un renouveau dans les relations bilatérales. Felix Tshisekedi, président de la République Démocratique du Congo, a exprimé son souhait d’une collaboration renforcée avec les États-Unis. « Il est crucial que les États-Unis apportent un soutien stratégique aux pays africains, non seulement dans le domaine économique, mais aussi dans la gestion des conflits et la lutte contre la corruption », a déclaré Tshisekedi. Cette prise de position démontre une attente vis-à-vis d’une politique américaine plus impliquée dans les processus démocratiques du continent.
De même, Faure Gnassingbé, président du Togo, a salué l’opportunité d’un second mandat de Trump, espérant un renforcement des relations économiques. Il a souligné que « les États-Unis jouent un rôle clé dans le développement des infrastructures en Afrique, et il est primordial que cette dynamique se poursuive ». Pour Gnassingbé, le soutien américain en matière d’infrastructures et de développement durable est vital pour la croissance économique de son pays et de la région.
Nana Akufo-Addo, président du Ghana, a également félicité Trump, tout en insistant sur l’importance de renforcer les échanges commerciaux et les investissements directs. « Le Ghana, comme de nombreux autres pays africains, a besoin de partenariats durables, non seulement pour ses infrastructures mais aussi pour ses secteurs stratégiques comme l’énergie et les nouvelles technologies », a-t-il affirmé.
Le profil de Donald Trump suggère une vision pragmatique des relations internationales. Ses priorités sont généralement orientées vers des actions concrètes et des résultats immédiats, qu’il s’agisse de sécuriser des contrats économiques ou de promouvoir les intérêts américains. Lors de son premier mandat, l’Afrique n’a pas occupé une place centrale dans sa diplomatie, une absence qui pourrait se traduire par une politique de renforcement des investissements commerciaux en Afrique, tout en minimisant l’implication des États-Unis dans des dossiers politiques ou sociaux complexes.
Les dirigeants africains, eux, semblent prêts à voir les États-Unis revenir dans la région avec des initiatives concrètes, mais ils soulignent également l’importance d’un engagement plus profond sur le plan de la gouvernance démocratique et de la sécurité régionale. La question qui persiste est de savoir si Trump, fidèle à son profil de businessman, saura dépasser l’optique purement économique pour adopter une approche diplomatique plus équilibrée.
La task force africaine que pourrait mettre en place Donald Trump semble viser une dynamique de renforcement des relations économiques avec l’Afrique, mais aussi une réponse géopolitique face aux influences croissantes de la Chine et de la Russie. Si cette structure est effectivement mise en place, elle devra jongler avec des priorités multiples : sécuriser des investissements, soutenir le développement infrastructurel, mais aussi répondre aux exigences de stabilité politique et de bonne gouvernance exprimées par les dirigeants africains.
En définitive, l’Afrique pourrait devenir un terrain de compétition stratégique pour les États-Unis, mais la véritable question demeure : Donald Trump et sa future task force seront-ils prêts à accorder à la région l’importance diplomatique et politique qu’elle mérite, ou l’approche restera-t-elle strictement économique, visant à maximiser les bénéfices des États-Unis tout en négligeant les défis plus larges du continent ? Seul l’avenir le dira, mais les signaux sont déjà lancés.